2023-01-31 Des nouvelles du front Nouvelles d’Iran du 18 au 29 janvier 2023

Introduction

Dans cette atmosphère de recul d’un soulèvement populaire qui a commencé il y a 4 mois, il semblerait que le Kurdistan et le Baloutchistan ont décidé de jouer les prolongations et de garder intact le feu de ce soulèvement malgré une répression inédite et un froid exceptionnel.

Dans les autres coins de l’Iran, malgré les slogans nocturnes dans les quartiers de grandes villes, les graffitis sur les murs, les mouvements de protestation au sein des écoles, des lycées et des universités et des grèves et rassemblements ouvriers éparpillés dans le pays, les manifestations et les rassemblements populaires s’amenuisent et le régime, profitant du froid et de la crise de l’énergie qui, physiquement crée une diversion dans les possibilités d’action et les objectifs de la population, essaie d’accélérer et de fortifier sa répression pour calmer le soulèvement tout en poursuivant ses efforts de normalisation notamment en continuant ses cérémonies annuelles comme le Festival artistique de Fajr.

Kurdistan, Baloutchistan, l’œil et lumière de l’Iran !

Néanmoins à Zāhedān et à Rask les baloutchs continuent leurs manifestations hebdomadaires, les vendredis, pour démontrer leur détermination et pour essayer d’éveiller les autres peuples et villes du territoire ; et ce, malgré un froid avoisinant les moins 10.

Le régime qui constate que cette région, à côté du Kurdistan, est devenue un bastion de la révolte, a depuis deux semaines intensifié sa répression en essayant d’arrêter toutes les personnes qui, d’une façon ou d’une autre, étaient identifiées en tant que meneur des rassemblements et des manifestations.

Le vendredi 20 janvier 2023, encore une fois, on a vu une manifestation à Zāhedān, après la prière de midi, aux alentours de la mosquée Makki, qui était menacé de destruction, Molavi Abdol-Hamid, imam de vendredi de la ville, de confession sunnite, a encore une fois exigé la poursuite des personnes qui avaient tiré sur la foule le 30 septembre 2022 et tué plus de 90 baloutchs ; aussi il a demandé la modification de la constitution iranienne.

Il a notamment déclaré que “notre constitution n’a pas bougé depuis 44 ans; il serait temps que cette constitution change. Comment peut-on fixer des lois et des règles pour les jeunes quand on n’écoute plus la jeunesse du pays ? Il faut mettre au goût du jour cette constitution pour que ça puisse correspondre à notre époque”.

Ce sont très exactement des propos que la République islamique n’a aucune envie d’entendre. Les forces de l’ordre, à plusieurs reprises, ont bloqué le parcours des manifestants en essayant de fouiller les gens et de créer des coupures dans leur rang.

La République islamique a augmenté la pression sur les responsables religieux sunnites dans toute la province, également à la ville de Rask, l’imam de vendredi de cette ville est interdit d’y tenir des rassemblements.

Abdol-Ghaffar Naghshbandi, qui était l’imam de vendredi provisoire de la ville, a été convoqué par la police et depuis on a plus de nouvelles de sa situation.

La semaine avant c’est arrestation, il avait déjà prédit que « je ne sais pas ce qui va m’arriver cette semaine, mais ce qui est sûr, c’est que l’État doit arrêter de réprimer les baloutchs.

On avait dit qu’à un moment, la rumeur de la destruction de la mosquée principale de Zāhedān qui s’appelle la mosquée “Makki” était répandue; ce qui avait suffi pour que des dizaines de personnes se portent volontaires pour la défendre; ils y ont monté la garde jour et nuit; entre-temps, la semaine dernière, 17 personnes parmi ces “gardes” ont été arrêtés par le régime.

Au nord du pays, à Galikesh, dans la province de Golestân, les baloutchs qui y résident, à côté des turkmens qui sont eux aussi de confession sunnite, ont vu leur imam, Mohamad-Hossein Molavi Gorgui l’ex l’imam de vendredi de Azadshahr mis sous pression; il a été convoqué et destitué auprès du tribunal spécial du clergé.

Les Baloutchs et les turkmens de cette région ont donc manifesté pour demander sa libération.

Le vendredi 27 janvier, à Zāhedān, sous la neige, des milliers de personnes se sont rassemblées et ont continué leur manifestation avec les slogans maintenant habituels de “Mort à Khamenei !” “De Zāhedān à Īzeh, je donne ma vie pour l’Iran !”…

Il faut voir dans la répression de ces deux dernières semaines, la main du nouveau gouverneur qui a été nommé et qui veut faire une démonstration de force en éteignant ces dernières flambées du soulèvement.

A Galikesh, la mobilisation de la semaine dernière a eu du succès et a pu libérer Gorgui de son assignation à domicile ; lui qui n’avait pas le droit de faire de discours, s’est présenté ce vendredi 27 dans le rassemblement ; c’est un recul du régime dans cette région ; le fait même de le laisser discourir en diapason avec le peuple baloutch et Molavi Abdul Hamid à Zāhedān constitue une victoire. Il était accompagné par un certain nombre de ses fidèles vêtus d’un linceul blanc pour démontrer leur détermination à défendre leur guide.

Les habitants de Taftân ont de nouveau arrêté les activités de la mine d’or dans cette zone

La ville de Taftân est située au pied du volcan du même nom qui culmine à plus de 4000m ; La ville qui est dans la province de Sistan et Baloutchistan est à 100km de Zāhedān.

On a su que le 13 janvier 2023 et pour la deuxième fois, les habitants de Taftân se sont à nouveau rassemblés sur la route de la mine d’or d’Anjirak de Taftan qui fait partie des mines les plus riches de l’Iran, pour protester contre l’extraction de l’or dans cette région et ont empêché les mineurs de poursuivre leur travail.

Des militants baloutchs ont rapporté que la mine d’or de Taftân est exploitée par la société Aria South”, alors qu’aucun permis n’a été délivré pour cela par les organisations environnementales.

Ce n’est pas la première fois que les habitants de Taftân protestent contre les activités prédatrices de cette mine, et en octobre et novembre 2022, ils avaient empêché la poursuite de l’exploitation minière à plusieurs reprises en se rassemblant devant la mine, en récupérant des machines et en bloquant les chemins qui y mènent.

Mais aujourd’hui, en même temps que les vendredis de résistance à Zāhedān, les habitants de Taftân ont maintenu un autre bastion de résistance afin de ne pas laisser la république Islamique piller leurs terres ancestrales.

Les cérémonies de La quarantaine à Īzeh

Comme nous l’avons déjà indiqué, malgré le fait que la République islamique n’a pas rendu les corps de deux personnes tuées à l’occasion du soulèvement, à Īzeh (Khouzestân) la population dans le petit village de Persilla, a néanmoins organisé cette cérémonie sans le corps de Hossein Saïdi le vendredi 27 janvier.

Ils avaient déjà organisé la cérémonie de quarantaine de Mahmoud Ahmadi martyr du peuple Qashqai de la même façon, sans corps et en enterrant ses vêtements traditionnels.

Rien n’entame la détermination du peuple Bakhtyari pour défendre le soulèvement contre la République islamique.

Rassemblement à Torbat-e Djam

Le mardi 17 janvier, dans la journée, à Torbat-e-Djam, une ville du nord-est du pays (100.000hab.), dans la province du Khorassan-e–Razavi qui est située à 165 km au sud de Mashhad, la population s’est rassemblée au centre-ville et s’est plainte contre la crise du gaz et le fait qu’il n’arrive plus à chauffer leur logement.

Des femmes qui racontaient leur galère à chauffer des enfants en bas âge ou des jeunes adultes qui se plaignaient de ne pouvoir chauffer leur mère qui doit s’asseoir sous 5 couvertures, mais qui tombe néanmoins malade. Un certain nombre d’entre eux ont pensé acheter des appareils de chauffage électrique mais le prix de ces appareils a augmenté en flèche et il est devenu très difficile de s’en procurer.

Une fois que les magasins ont été vidés de ce type de produit, les gens se sont amassés devant la Croix-Rouge qui a refusé de leur en donner ; après des essais de négociation avec les responsables, les gens y sont entrés en force et ont pris tous les appareils électriques pour essayer de chauffer chez eux. On était bien à Torbat-e-Djam, mais on avait l’impression d’assister à des pillages à Los Angeles où les gens sortaient des magasins avec des cartons de produits électriques.

Déjà la veille, ils s’étaient rassemblés devant le siège de la province pour interpeller le gouverneur sur la question du chauffage.

La nuit tombée, les gens étaient de plus en plus nombreux et en colère.

Le porte-parole du gouverneur s’est pointé pour les calmer mais ça n’a fait que faire monter la tension pour finir par des slogans de « A mort gouverneur, démission gouverneur ! »

« Concitoyen, crie ton droit ! »

Le rassemblement s’est transformé en une manifestation nocturne et les slogans se sont mutés en « A mort Khamenei ! »

Dans d’autres villes de Khorassan aussi, des scènes de révolte populaire ont été constatés. Partout ça commence avec des gens qui sortent pour trouver un moyen pour chauffer leur logement, et devant l’incapacité des responsables à répondre à leur problème, ils manifestent contre le régime.

Grève des ouvriers à la Pétrochimie de Mahshahr

Les ouvriers de la pétrochimie de Bandar (port) Mahshahr (Khuzestân) sont entrés dans leur quatrième jours de grève pour obtenir les arriérés de salaire et l’amélioration de leur condition de travail.

Ils se sont rassemblés devant l’usine pour protester contre la direction qui reste sourde à leurs revendications.

La protestation des travailleurs de cette boite pétrochimique au cours des derniers mois visait également le fait que l’entreprise avait transféré 300 personnes des employés, sous la supervision de Bandar Mahshahr Non-Industrial Operations Company. Ce transfert s’est traduit par la suppression de certains avantages tels que les primes à la production et, par conséquent, la réduction des revenus des travailleurs.

Un des ouvriers contractuels spécialisés, avec quinze ans d’expérience, a témoigné lors d’une courte vidéo que « leur salaire est de 13 millions de Tomans tandis que les organismes étatiques ont déclaré le seuil de pauvreté à 30 millions. Aussi, qu’il y a des Mollâs pour leur raconter des “balivernes” qui sont embauchés sur des contrats avantageux en CDI. »

Grève des ouvriers et employés du Cuivre à Shahr-e-Babak

Les ouvriers et les employés du Holding “Mésse féléz ranguine” (cuivre-fer coloré) qui fait partie d’un ensemble de compagnies minières de la ville de Babak à proximité de la ville de Kerman (Sud-ouest du pays) se sont mis en grève.

Les historiens pensent que la ville de Babak a été construite par Ardeshir Babakan, le plus célèbre des rois sassanides, il y a près de 1800 ans.

Maymand, l’un des 4 villages les plus anciens d’Iran, se trouve à 36 km de Shahr-e-Babak. Sarcheshmeh et Miedook, les plus grandes mines de cuivre d’Iran, sont situées autour de cette ville.

Rangin Copper Metal Company a été créée en juin 1999, et a commencé ses travaux par la mise en place d’une usine de traitement de concentré de cuivre près de la mine de cuivre de Miedook dans la ville de Babak. En 2004, avec la formation de la Daryaban Gohran Company, qui est la principale exploitation du groupe, plusieurs autres entreprises manufacturières ont été incluses dans cette société. L’une des fonctions de cette société est l’extraction et l’exploitation de la mine de cuivre et la production de concentré de cuivre.

Nous savons que les ouvriers du cuivre de KhatounAbad depuis des années sont en lutte pour régulariser leurs conditions de travail précaires.

Déjà en 2003, à KhatounAbad à proximité de Shahr-é-Babak, province de Kerman, l’employeur de la mine de cuivre a licencié 200 ouvriers du bâtiment du complexe de cuivre en construction, à qui il avait promis de les embaucher comme mineurs après l’achèvement des travaux de construction.

Mais une fois les travaux terminés, il ne respecte pas sa promesse. Les travailleurs licenciés se mettent en grève et font un sit-in avec leurs familles pour protester contre cette décision. Mais cette grève et ce sit-in ne donne pas de résultat. Pour attirer l’attention, les ouvriers bloquent la route entre KhatounAbad et Babak. Mais au lieu de répondre aux revendications des travailleurs, les forces du régime attaquent les travailleurs avec des tirs à partir d’un hélicoptère.

Un des ouvriers est mort sur le champ. Les travailleurs se dirigent alors vers le siège du gouverneur de la ville de Babak. Les autres citadins les rejoignent. Les forces répressives envoyées par le gouvernement (réformiste à l’époque!) attaquent les travailleurs. Dans cette attaque brutale, au moins 4 travailleurs nommés et un étudiant ont été tués et des centaines d’autres blessés.

Plus récemment, en 2016 aussi, plus de 200 personnes étaient rassemblées durant plusieurs jours devant le siège du gouverneur. Leur revendication était toujours l’obtention des contrats fixes en CDI pour sortir de la précarité.

Grève de l’aqueduc de MeshguinShahr

Samedi 28 janvier, une grève illimitée des travailleurs de l’aqueduc de Meshgin Shahr a commencé pour protester contre le non-paiement de 9 mois de salaires et les promesses non respectées des autorités.

Ils ont écrit : « Nous, 28 des ouvriers de l’aqueduc de Meshgin Shahr avec des emplois spécialisés de plombier, coloriste et dessinateur de contours, qui travaillons dans les villages de la ville, n’avons pas reçu de salaire depuis plus de 9 mois.

Il n’y a pas si longtemps, le PDG d’Ardabil Province Waterworks nous avait promis que les arriérés seraient payés en moins d’une semaine, mais cette promesse, une fois encore n’a pas été tenue. »

L’un des travailleurs de Meshgin Shahr Waterworks a également déclaré à un journaliste d’un média local : « Les travailleurs utilisent des véhicules personnels pour effectuer des missions dans les villages aux alentours, de sorte qu’en raison du non-paiement des salaires, ils n’ont même pas l’argent nécessaire pour remplir leur réservoirs d’essence et partir en mission;

C’est pourquoi, nous nous sommes unis et nous avons décidé d’arrêter de travailler à partir d’aujourd’hui, samedi 28 janvier, dans un mouvement de protestation et jusqu’à ce que nous recevions nos droits légaux. Cette fois-ci nous n’écoutons plus les belles promesses. »

Grève des ouvriers de production d’huile alimentaire Jahan

Le samedi 28 janvier, les travailleurs de l’huile végétale de “Jahan” ont annoncé leurs protestations contre le chômage avec des revendications en suspens et des promesses non tenues des fonctionnaires de l’Etat.

L’un des ouvriers de l’huile végétale de Jahan a déclaré à un journaliste : « Avant le licenciement, nous travaillions avec 80 autres ouvriers dans cette unité de production d’huile alimentaire, mais finalement, au début du second semestre de cette année, 60 d’entre nous ont été licenciés par l’employeur de Jahan Oil et depuis, nous cherchons partout pour trouver un emploi. »

Il a déclaré que « l’ancien employeur a soi-disant “ajusté” le surplus de main-d’œuvre après l’arrêt de l’exploitation de l’usine, en licenciant tous les ouvriers qui étaient sur des contrats précaire d’un mois; 13 de nos collègues ont pris la responsabilité de protéger et de garder l’usine. »

« Parmi les travailleurs licenciés, il y a des personnes qui ont des anciennetés de 15 ans.

Bien que nous recevions actuellement une assurance-chômage, mais dans les conditions économiques actuelles, il est devenu très difficile de faire face aux dépenses de subsistance, nous nous inquiétons pour notre futur, car il n’y a plus de travail…

Après cinq mois de chômage, nous n’avons pas été en mesure de trouver un nouvel emploi pour subvenir à nos besoins et à ceux de nos familles, et les autorités provinciales et municipales ne nous ont pas aidés dans nos recherches.

Chacun des chômeurs a déposé une plainte distincte auprès du Département du travail de Zanjan pour recevoir des demandes d’assurance-chômage et des arriérés, et cela fait maintenant trois mois que leurs règlements ont été décidés. »

Ce travailleur de l’huile végétale de Jahan a parlé des arriérés qui sont en suspens: « après la fin de la relation de travail, ils restent des arriérés comprennent quatre à cinq mois de salaires impayés ainsi que des heures supplémentaires et du travail de nuit, des trajets domicile-travail, des indemnités de déjeuner et d’habillement.

Le règlement de ces arriérés passe par le département du travail qui ralenti leur application. »

Le budget 1402

Raïssi, Président de la République a fait un discours au Parlement en promettant monts et merveilles. Que le dollar, l’or, l’inflation … va baisser dans les semaines et mois à venir.

L’inflation d’après le centre des statistiques en Iran a dépassé les 46% ce qui est le plus grand chiffre depuis 27 ans.

Le dollar est à 45000 Tomans.

C’est dans cette situation que le parlement a décidé du budget qui a une augmentation de 40% par rapport à l’année dernière.

Les organismes étatiques vont recevoir un budget plus important comme le ministère du renseignement, l’armée des Pasdarans, la radio télé publique, l’armée, le centre des services de Howsé, l’organisation des publicités islamique etc.

Par contre, d’autres lignes budgétaires n’ont pas bougé comme la lutte contre la pollution atmosphérique.

A côté des augmentations de budget pour les organismes militaires, sécuritaires, de répression et de propagande, on voit que la ligne budgétaire concernant la protection des personnes souffrant d’un handicap a purement et simplement disparu. Un rassemblement de protestation de nombre d’handicapés a eu lieu devant le parlement ce 22 janvier.

Le budget pour la santé, l’enseignement, la protection de l’environnement n’ont pratiquement pas bougé; le budget pour les maladies qui ont des traitements difficiles a drastiquement baissé.

Pour la République islamique seulement la répression et la propagande justifient une augmentation de budget .

Il faut bien que les gens paient pour être réprimés et éduqués.

Une nouvelle vague de privatisation

Le gouvernement Raïssi a fait passer en catimini une loi sous l’appellation de “Rendre productif les biens étatiques” pour mettre en vente l’équivalent de 108 mille milliards de tomans des biens et des propriétés lui appartenant pour essayer de combler le déficit budgétaire prévu pour l’année 1402 (du 21 mars 2023 au 20 mars 2024), en fait, des dépenses non encore approvisionnées.

Sur proposition des chefs de pouvoir exécutifs, judiciaire et législatives et avec l’accord du Guide, une commission de 7 personnes a été désignée pour déterminer et conduire ces ventes qui ne sont que des privatisations aux profit des proches et des copains. Cette commission va travailler sous la houlette de M.Mokhber, adjoint de M.Raïssi, mais surtout le patron du fameux “Quartier général de l’exécution du commandement de l’imam “.

L’État iranien a une longue expérience pour faire passer les biens publics au secteur privé. Il soi-disant “vend” ces biens à des tarifs ridicules à ses proches en crédit.

Au moment de l’achat, l’acheteur ne paie en liquide qu’une petite partie du prix et le reste doit être payé par mensualité sur plusieurs années. Même cette avance est en général empruntée à une banque sans caution sérieuse et par la recommandation d’une autorité militaire ou religieuse. En plus ce “reste ” est oublié et personne ne vient les enquiquiner pour le remboursement du crédit. Une fois que l’acheteur a mis la main sur le bien vendu, il commence à le démanteler et le revendre par lots.

S’il s’agit d’une entreprise de production, il entame la “restructuration” en virant le plus grand nombre d’ouvriers et d’employés, en démantelant les appareils productifs et en les vendant à prix cassé… souvent le terrain et les bâtiments de l’entreprise sont vendus une fois qu’ils ont obtenu un changement de destination ou d’affectation de la mairie du coin pour transformer par exemple une usine agroalimentaire en terrain bâtissable pour y construire des logements ou des habitations.

L’exemple parfait de ce genre de privatisation était l’usine agroalimentaire de Haft-Tappeh dont on a déjà raconté les péripéties.

Souvent les personnes qui sont à l’origine de ces forfaitures ne peuvent être inquiétées car ils exigent leur liberté d’entreprendre pour payer le salaire des ouvriers.

En réalité, l’État veut faire rentrer un peu d’argent liquide dans ces caisses mais surtout se débarrasser des biens ou des entreprises déficitaires qui lui créent plus de problèmes que ce qui lui rapportent.

Cette fois-ci, disposant de l’expérience passée des privatisations et tous les problèmes que celles-ci leur ont créés, en terme de poursuites judiciaires, le gouvernement a décidé de trouver dès le départ une solution en bloquant toute possibilité de recours ultérieur contre les décideurs et même les exécutants ; autrement dit toutes les personnes qui ont d’une façon ou d’une autre une implication dans ses privatisations ne seraient jamais inquiétées par la justice et leurs propriétés ne seraient pas mises en cause.

Et pour renforcer ce bouclier juridique, il a été décidé que toute intervenant contre l’application de cette procédure peut être condamné à 5 ans de prison.

Autrement dit si un responsable honnête quelconque des organes de protection de l’État, un comptable ou un observateur des procédures légales de l’Etat … trouve à redire sur un aspect d’une vente, trop manifestement contre le bien public, il aurait lui-même des problèmes avec la justice !

Les otages occidentaux en Iran

Nous avons appris ce samedi 28 à travers une manifestation qui a eu lieu à la place Trocadéro à Paris demandant la libération de 7 otages français détenus en Iran, qu’il y a au total une quarantaine de ressortissants étrangers notamment des franco-iraniens qui sont détenus depuis parfois des années en Iran et qui risquent des peines qui peuvent être très lourdes ; c’est la politique d’échange de prisonniers que la République islamique a toujours poursuivie pour pouvoir continuer ses actions terroristes sur le sol occidental ; ses agents peuvent toujours compter sur un régime qui ne lésine pas sur les moyens pour les libérer et peut aller jusqu’à prendre en otage de simples touristes ou de membres des ONG pour pouvoir les échanger plus tard avec ses envoyés

Le festival des arts visuels Fajr : essai de normalisation

Le gouvernement islamique, de longue date, a essayé d’imiter tout ce que faisait le régime du Shah, en y introduisant ses règles et ses coutumes islamiques.

Une des domaines dans lesquels le régime du Shah était actif, surtout à travers le personnage de Farah Diba, “impératrice de l’Iran”, qui se considérait comme grande amatrice d’art et connaisseuse en la matière, était le festival de l’Art de Shiraz où étaient invité dans un faste extraordinaire, accompagné de frais considérables, les meilleures artistes internationaux du moment ; des réalisateurs de théâtre et du cinéma, des compositeurs de premier plan, des chefs d’orchestre, des danseurs et danseuses étoiles, des artistes peintres …

Il fallait proclamer face au monde moderne que nous sommes dans le coup.

Maurice Béjart faisait son ballet de Golestân, Stockhausen son concert de musique électroacoustique et de la spatialisation du son et Peter Brook y représentait sa dernière trouvaille théâtrale.

L’Iran, politiquement une dictature qui ne tolérait même pas la publication des journaux indépendants, d’un seul coup s’ouvrait, pour une dizaine de jours, à l’avant-garde artistique du monde culturel !

Il se considérait à l’apogée de la civilisation moderne et cherchait un rayonnement international.

Ce petit jeu a duré une dizaine d’années avant que l’insurrection de 79 y mette un point final.

Il y avait quelque chose d’ironique et en même temps dramatique de voir la population du centre du pays, du côté de Shiraz et les villes aux alentours, dont la population était encore très traditionnelle et même on pourrait dire campagnarde, d’affronter la musique moderne (qui était à l’époque, même moderne et audacieuse pour l’Europe) ou des filles nues attachées par les pieds et pendouillant dans les allées du Bazar Vakil par Shuji Terayama. C’était la confrontation de deux mondes qui laissait les gens perplexes et un peu en colère. Dans les mêmes allées du Bazar, la nuit les sans-logis, venus en ville pour se dégoter un boulot, dormaient en pleine rue quand les artistes étrangers étaient logés dans les palaces Safavides.

Il est vrai qu’un certain nombre d’intellectuels, notamment les étudiants de l’université de Shiraz ou d’Ispahan en profitait pour se mettre à la page de ce qui se passait en Occident. Ces festivals et notamment le festival international de films de Téhéran é tait l’occasion de voir tout ce qui était normalement censuré en Iran et donc vous pouvez y voir des films comme “la couleur de la grenade” de Paradjanov pendant une séance, tandis que même en France, il a fallu attendre 1977 pour qu’il soit projeté une seule séance au Cosmos à Montparnasse.

Après une première période de méfiance, ou le cinéma iranien n’a quasiment pas existé, la RI a accepté d’utiliser ce vecteur de propagande à condition que les artistes propageant les “valeurs islamiques”. Donc, la République islamique a essayé de renouer avec cette tradition en y mettant tout son cœur doctrinal.

Le festival de Fajr était l’exemple parfait de cet effort .

Pendant une dizaine de jours, d’abord le théâtre puis le cinéma y sont à l’honneur. Le ministre de la culture ne manque pas l’occasion pour se féliciter à chaque fois de la qualité supérieure des œuvres jouées ou projetées pendant ce festival. Cette année, à l’occasion du 41ème année du festival, il a fait un speech à la gloire de la création artistique Islamique et a rendu hommage avec raison aux efforts de l’armée des Pasdarans car quasi toute la production audiovisuelle en Iran est sous la coupe des gardiens de la Révolution et de leur organisme de financement de production artistique qui s’appelle l’Organisation Owj.(Haut/Apogée)

Cette année une grande partie des artistes qui participent normalement à ce genre d’événements sont ou arrêtés ou menacés ; donc beaucoup d’entre eux s’abstiennent à y participer.

Le secrétaire général du festival a critiqué les artistes qui n’ont pas voulu participer à leur cérémonie on les appelant des “dictateurs culturels et monétisés”.

Depuis l’année dernière et surtout le commencement du soulèvement, beaucoup de ces artistes, réalisateurs, actrices, acteurs ou techniciens ont publiquement annoncé leur démission et ne participent plus à ce genre de propagande honteuse; ce qui n’empêche pas, bien sûr, une autre partie qu’on appelle les « artistes gouvernementaux » de continuer à y produire leurs œuvres.

Mais cette année, du moins la partie théâtre qui a déjà commencé, n’a pas attiré les foules et ils ont dû remplir les salles en amenant les familles des sympathisants du régime, de sorte qu’on distinguait parmi les spectateurs des enfants et même des bébés.

Le boycott était tellement fort que même les médias pro-régimes ont avoué que cette année « le théâtre n’avait pas trouvé ses interlocuteurs ».

Sur la partie cinéma, qui a commencé cette semaine, la présence des films produits par les organismes étatiques est encore plus prononcée que d’habitude.

En fait, c’est la liste des différents organes artistico-culturels du pouvoir en place :

« La Fondation cinématographique Fârâbî » y présente 9 films à elle seule. C’est l’institution nationale du Cinéma iranien sous la houlette du ministère de la culture et de la propagation islamique, à travers laquelle la politique culturelle et artistique de l’Etat est mise en musique.

« L’école artistique de la révolution islamique » a produit 3 films ; cette école est directement dirigée par « l’Organisation islamique de développement/de publicité » qui se concentre principalement sur les activités artistiques.

« Foyer d’éducation artistique de la jeunesse » ou « Institut pour le développement intellectuel des enfants et des jeunes adultes » qui est responsable pour la présentation de 2 films.

Cet institut a une part importante dans la qualité du cinéma iranien et a pu faire grandir des cinéastes importants comme Kiarostami en son sein.

Cette institution qui existe depuis 1975 sous la houlette de Farah Diba, avec notamment ses bibliothèques implantées un peu partout en Iran, a fait beaucoup dans le développement culturel de générations de jeunes.

Mais, justement comme elle a été créée par l’ancien régime, elle a toujours été l’objet d’attaques incessantes des responsables du régime. Dernièrement, le gouvernement de Raïssi a essayé, sous prétexte de la non-rentabilité de fermer l’institut et de vendre ses locaux au privé c’est à dire aux famille aux proches

« L’organisation artistique Owj » qui est la propriété du Sepah a présenté 2 films

En 2018, le directeur exécutif d’Owj, Ebrahim Hatamikia, a publiquement admis que l’organisation était gérée et financée par le CGRI .

Même l’armée régulière a produit un film qui fait partie de la compétition.

Donc on peut constater que sur une vingtaine de films présentés à la compétition, une grande majorité sont des productions gouvernementales et étatiques et donc il faut les considérer plutôt comme de la propagande officielle.

D’un autre côté, comme les réalisateurs confirmés n’ont pas voulu participer et présenter des films pour le festival, nous voyons que 16 des réalisateurs sont des inconnus et qui sont à leur premier film. A quelque chose malheur est bon.

Malgré toutes les préventions de la République islamique pour choisir les personnalités qui vont s’exprimer sur la scène de cette cérémonie il n’a pas pu empêcher Mohamad-Hossein Farahbakhsh, scénariste et producteur de cinéma, qui est un des lauréats, de déposer son prix par terre et de dire qu’« il n y a pas à se glorifier quand nos meilleurs personnes ont été tués ou se trouvent en prison ».

Au commencement du soulèvement au mois de septembre, une centaine de cinéastes iraniens avaient rédigé un appel au boycott en faisant référence à la chanson de Shajarian, qui pendant la répression qui avait suivi l’élection contesté d’AhmadiNejad a interpellé les forces de l’ordre par une chanson qui est restée dans les annales : « dépose ton fusil par terre ».

Sous ce titre, les cinéastes se sont réclamés pour le soulèvement et contre la répression qui est abattue sur les protestataires ; c’était leur deuxième déclaration dans ce sens.

Un des critiques du cinéma, au nom de Farasati aussi, a boycotté la télé et les festivals officiels. C’est pourtant une personnalité qui pendant des années avait travaillé avec le régime et avait critiqué d’un air très hautain le niveau du cinéma iranien par rapport au cinéma classique occidental.

Le cinéma indépendant iranien a toujours essayé de suivre les traces de ce qui était le cinéma du réel, le cinéma progressiste et aujourd’hui aussi un grand nombre de ces cinéastes se trouve exilé à l’étranger.

Le plus marrant c’est que le ministre de la culture lui-même dans son discours insiste sur le fait qu’il ne faut pas politiser ce genre d’événement artistique alors que la quasi-totalité de la production cinématographique présentée dans ce festival est produit par les organes de répression et les organes culturels de la République islamique et n’ont pas d’autres buts que de propager leur ligne politique et leur valeur soi-disant islamique.

Si cette année, il se plaignent de la politisation du festival, c’est parce qu’une grande partie des artistes ont refusé de participer à cette mascarade de propagande.

Suite aux activités des cinéastes indépendants iraniens qui sont à l’étranger, le festival de Berlin a déclaré qu’il ne recevra plus les films produits par le gouvernement iranien.

Le rapport de l’État iranien avec ses cinéastes et à travers eux avec le monde culturel occidental est assez complexe, avec des hauts et des bas, suivant la politique déterminée de la République islamique avec le monde extérieur.

Quand les artistes iraniens, installés à l’étranger gagnent des prix, la République islamique censure les informations à leur propos pour les dénigrer ou les traite comme des personnes ayant vendu leur patrie.

Mais en même temps, il suffit qu’un de ces artistes, lors de son speech de remerciement, ne mentionne pas le sort de la population, ne dise rien qui pourrait être interprété “contre le régime” ou qu’il dédicace son prix au peuple iranien pour que le gouvernement en tire gloire et l’affiche sur tous ses moyens de communication comme réussite de la République islamique.

Les critiques internes et le rôle de Mojtaba, fils du Guide

On a déjà évoqué ici la question de la perte des soutiens internes du régime. Ce mouvement continue depuis quelques semaines et on entend des fuites à propos des critiques envers la façon dont l’État réagit par rapport au soulèvement actuel.

Ces critiques viennent même de la part des personnalités de l’armée des pasdarans, des Bassiji, ou autres responsables étatiques. On les a même entendus parfois de la bouche des imams de vendredi qui sont normalement censés formuler leur discours d’après les orientations qu’ils reçoivent d’un bulletin interne qui est publié chaque semaine par la maison du guide.

C’est en réaction à ce genre de discours critique envers l’État et le gouvernement que Khamenei le 10 janvier avait prononcé son discours qu’on a déjà relaté la semaine dernière à propos des tavabines.

Par exemple, on peut citer le discours qui a été prononcé le 30 décembre dernier par le remplaçant du commandant des forces armées, un certain Sepehri, remplaçant de M.Baghéri, chef de l’état-major des forces armées, mais aussi le discours de Sardar Hamid Abazari, conseiller général auprès du Sepah.

Dans tous ces discours, on entend la critique orientée non pas directement vers Khamenei mais plutôt vers les gens qui dans leur jargon sont appelés “les Khavas”, ce qui veut dire les particuliers.

Ils entendent par-là, les hauts responsables de l’État, ceux qui ont une influence dans la gestion des affaires.

Quand ils sont en train de critiquer Khavas, ils entendent essentiellement les personnes qui, de leur point de vue, sont en train de mener réellement la répression et de l’organiser de manière quotidienne; ces personnes ne sont autres que le cercle de Commandants qui entoure le fils de Khamenei, Mojtaba qui est né en 1969, qui a fait ses études secondaires dans le lycée Alavi, qui était au temps du Shah, l’institution spécifique pour les enfants de l’élite du clergé et des nationalistes religieux.

Il a fait ses études supérieures au sein de du Howsé et a fini par y enseigner.

Mojtaba était toujours auprès de son père et en quelque sorte a joué le rôle du secrétaire particulier. Il est marié à la fille de Monsieur Haddad-Adele que l’on a eu déjà le plaisir de présenter dans ses colonnes.

Apparemment, le couple a eu des problèmes de fertilité qui ont été traités à Londres durant un voyage de toute la famille pour accompagner la mère. La rumeur publique dit que ce traitement a coûté plus de 2 millions de livres sterling. Il a amassé une fortune importante, bien sûr, à travers des prête-noms au Canada et en Grande-Bretagne.

Pourtant Mojtaba n’a pas de travail, ni de fonction officielle à part l’enseignement dans le Howsé. Il doit en particulier enseigner ce qu’on appelle “les leçons externes” (درس خارج) qui sont celles qu’on est censées recevoir au-delà l’enseignement classique de théologie pour pouvoir prétendre au degré de Mojtahed. Au bout d’une dizaine d’années d’enseignement, il pourrait éventuellement et avec l’accord de ses pairs être nommé Ayatollah.

Ce que son père Khamenei, au moment de sa désignation comme Guide n’était pas.

D’ailleurs, une vingtaine d’années après sa désignation par le “majless-é-khobregan” (“l’assemblée des élites”, c’est une institution qui a le devoir de vérifier la correspondance des lois avec la constitution, le Parlement des élites religieux, constitué par une cinquantaine de religieux. Ça peut être considéré comme l’équivalent du Conseil Constitutionnel en France). L’enregistrement vidéo de cette séance particulière et des discussions qui y ont eu lieu a été rendu public, il y a une dizaine d’années.

On y voit L’Ayatollah Rafsanjani, qui assure la présidence de cette assemblée, au moment où celui-ci est en train de décider si, après Khomeyni, la succession doit être assurée par un conseil ou par une personne.

A ce moment particulier de la séance, Rafsanjani propose Khamenei en tant que guide provisoire, le temps que les khobregans désignent en temps voulu et sans précipitation un Guide définitif. Pour convaincre les autres membres de l’assemblée, il évoque un souvenir de discussion avec l’imam Khomeyni qui aurait désigné lui-même Khamenei comme quelqu’un de tout à fait apte à assurer sa succession.

Il faut savoir qu’avant cette date, la personne choisie par Khomeyni et tout indiquée pour cette charge était l’Ayatollah Montazeri qui après son intervention au sujet de la fatwa de Khomeyni pour liquider les révolutionnaires et les communistes en 81, a été, comme on l’a déjà expliqué, écarté du cercle du pouvoir et assigné à domicile.

D’ailleurs quelques années plus tard, il est mort de manière douteuse et son fils a prétendu qu’il a été assassiné par le régime.

Donc Rafsanjani prétend que l’imam Khomeyni a lui-même désigné monsieur Khamenei comme un successeur potentiel.

Quand son nom est proposé comme candidat éventuel, Khamenei qui n’a pas encore le degré de l’Ayatollah se lève en refusant cette proposition et en précisant (c’est une phrase que tous les Iraniens ont maintes fois entendue) “qu’il faut pleurer pour la situation d’un pays où on me désignerait comme guide” et pour donner une explication à son refus il précise que “beaucoup de ces personnes, présentes ici même, ne vont pas accepter mes décisions”. C’est à ce moment-là qu’une partie des ayatollahs présents réagisse en disant qu’ils acceptent volontiers monsieur Khamenei « à condition que ça soit provisoire. »

Comme beaucoup d’autres situations, c’est un provisoire qui a, pour l’instant, duré plus de 30 ans. Khamenei aujourd’hui à plus de 80 ans et son camp depuis quelques années, suivant son choix de désigner son fils, prépare activement sa succession en plaçant des personnes de confiance en charge des responsabilités, c’est à dire ceux qui ont déjà fait allégeance à Mojtaba, notamment une grande partie des Pasdarans et toute la structure de répression mais aussi financière du pays.

C’est ainsi que les critiques qui sont faites aujourd’hui sur la manière de fonctionner le régime sont indirectement dirigées vers Mojtaba.

D’ailleurs, la rumeur dit que ça fait des mois que c’est lui qui prend les décisions les plus importantes et que son père ne fait que diffuser ses décisions auprès du public.

Quand la discussion au sujet de la succession du guide a pris de l’importance, notamment il y a quelques mois, quand Khamenei était malade et sous traitement, des personnalités se sont exprimées pour dire qu’on a fait une révolution pour ne pas avoir un système monarchique, basé sur l’héritage, que si on a chassé un souverain monarque, ce n’est pas pour le remplacer par un autre, même s’il est le fils du guide actuel.

D’autres ont répondu à ces critiques en disant que Mojtaba ne serait pas choisi en tant que fils de Khamenei, mais par ses qualités intrinsèques; c’est vrai qu’on ne veut pas un système basé sur l’héritage, mais en même temps, il n’y a aucune raison de se priver d’une personne qualifiée juste parce qu’il est le fils de quelqu’un.

C’est ironique de savoir que c’est exactement dans les mêmes termes que le petit Shah justifie sa candidature implicite pour le pouvoir futur de l’Iran.

Mojtaba, depuis des années, développe ses réseaux à l’intérieur du Sépah et les autres instances du pouvoir pour préparer le terrain avec l’appui de son père bien entendu; il a à sa disposition un vrai réseau de fidèles mais la crise actuelle que le régime traverse lui fait subir les critiques de l’intérieur de la part des gens qui ne sont pas contents de la façon que les affaires du pays sont gérées.

La tuerie des enfants, plus de 70, les condamnations par pendaison, les arrestations sommaires, la répression des peuples Kurdes, baloutch … la situation des prisonniers récents qui aujourd’hui dépassent largement les 20000, les tortures et les aveux publics, l’attitude du régime à l’égard de ses célébrités artistiques ou sportifs s’ajoutent aux critiques sur la gestion des protestations.

Beaucoup de ces personnes peuvent même considérer que des membres de leur famille soient impliquées dans les protestations.

L’appareil judiciaire aussi se trouve sur le feu des critiques pour ces tribunaux expéditifs et notamment les tribunaux « on line » qu’ils ont instaurés, qui après quelques minutes condamnent les gens à des peines de prison ou même à des exécutions.

Rassemblement devant le parlement européen

La manifestation des Iraniens devant le Parlement européen, qui a eu lieu au début de la semaine dernière a rassemblé selon la police 12000 personnes, ce qui veut dire qu’il pouvait être entre 20 et 30 000 personnes.

À la fin de ce rassemblement la présidente du Parlement européen, Roberta Massola, a prononcé des paroles convenues sur le soutien de l’Europe, que les gens sont du bon côté de l’histoire et que l’histoire leur donnera raison, … que 500 million d’Européens sont derrière vous et soutiennent le mouvement pour la liberté.

Dans la manifestation de Berlin, au mois d’octobre, devant tous les caméras il y avait des drapeaux tricolores avec le signe de la royauté; même si on pouvait voir ici et là des banderoles qui disaient “on ne veut pas d’oppresseurs, que ça soit le Shah, que ça soit le Guide”.

Visiblement ce slogan était porté par une minorité.

Ce qui confirme de plus en plus que le mouvement d’opposition dans la diaspora tend plutôt vers le nouveau Shah, malgré tous les efforts des gens et des organisations de gauche qui essaient d’imposer un soi-disant bloc internationaliste.

Cette tendance idéologique n’est pas très étonnante vu le niveau de vie en générale de ces iraniens, dont une grande partie s’est sauvée de l’Iran suite à l’insurrection de 79. Beaucoup d’entre eux aussi sont tout à fait intégrés dans les classes moyennes des sociétés occidentales; depuis la manifestation de Berlin, on a l’impression qu’il y a une coupure entre les slogans scandés par les gens de l’intérieur et ceux de l’extérieur.

La population modeste qui se trouve dans la rue en Iran, n’a jamais ou très rarement prononcé des slogans pro-royauté et une vraie coupure semble se dessiner entre les slogans choisis par la diaspora et la réalité des revendications politiques en Iran; on ne va pas jusqu’à dire qu’ils représentent aujourd’hui une contre révolution mais on n’en est pas loin.

Donc, suite aux actions et manifestations de la diaspora iranienne dans les capitales et les villes occidentales, surtout le rassemblement de Strasbourg, le Parlement européen a décidé de considérer l’armée des corps des gardiens de la Révolution de l’Iran comme terroriste.

Cette décision qui à court terme pourrait, en cas d’acceptation par les instances supérieures de l’Europe, avoir une certaine importance dans l’activité économique du Sepah a fait réagir le gouvernement iranien.

Le porte-parole de l’État iranien a de son côté menacé les Européens.

Pour l’instant, il s’agit d’une résolution du parlement qui porte sur la réponse de l’union européenne par rapport à la répression et les exécutions en Iran; le parlement donne ainsi des directives aux organes exécutifs de l’Europe et formule des demandes aux autorités iraniennes. La grande majorité de ces demandes concerne les questions de droit de l’homme, leur respect en Iran … et va jusqu’à demander aux iraniens de donner une date pour l’abolition de la peine de mort.

Par rapport aux organes exécutifs de l’Europe, le parlement demande qu’on soutienne plus activement la société civile iranienne, l’opposition, qu’on utilise les budgets qui existent pour aider les immigrés iraniens,

Accorder plus facilement des visas aux iraniens qui sont en danger et poursuivis… et enfin Il a demandé à l’union européenne de mettre le nom du Sépah sur la liste des organisations terroristes.

Une partie des États membres ont insisté pour l’arrêt total des négociations sur le traité nucléaire. Cette demande a été rejetée et il semble donc que la majorité des pays désirent encore continuer les négociations sur le nucléaire iranien.

Toute la partie de la résolution en direction de l’Iran, est du blabla démocratique qui ne serait même pas lu avec attention par ses responsables ; la partie qui concerne les instances internes de l’union aussi, compte tenu des limitations de l’union concernant les questions de politique étrangère et de sécurité intérieure de chaque pays, n’aurait aucun caractère contraignant pour les États membres. Cette position de souveraineté sur ces deux champs, est surtout défendue par la commission et le conseil de l’Europe (à 27).

Donc, primo, l’Europe ne peut pas faire passer une loi contraignante sur la politique étrangère, et secundo au moment d’étudier une proposition, la commission et le conseil doivent la considérer du point de vue de chaque État et de ses intérêts particuliers.

En plus, il paraît que Josep Borrell, Haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères, n’est pas sur la même ligne politique que ce qui est exprimé par la résolution, c’est apparemment la raison pour laquelle il n’a même pas participé au débat sur cette résolution.

Si réellement, le Conseil de l’Europe et la commission européenne désiraient mettre les gardiens de la révolution sur la liste des terroristes, ils n’avaient aucunement besoin d’une résolution du Parlement, ils pouvaient le faire directement.

Au fond, on peut dire qu’il s’agit d’un élément supplémentaire de pression politique sur l’État iranien, sans conséquences immédiates sur son orientation.

La diaspora iranienne et surtout cette opposition bourgeoise qui petit à petit est en train de se constituer à l’étranger, a besoin de dire au millions d’Iraniens qui participent à ces actions, qui se déplacent de pays en pays que leur activité sert réellement à quelque chose.

Les positions de Borrell mais aussi de Macron sur la question iranienne restent ambiguës. Macron, il y a une quinzaine de jours, a rencontré Abdollahi à Oman et a discuté chaleureusement avec lui. Il a relancé l’idée de poursuivre les négociations sur le nucléaire iranien qui, depuis le soulèvement, est au point mort. D’ailleurs cette rencontre “ inopinée” a permis aux iraniens de se gargariser sur le plan intérieur encore une fois sur leur force et la stabilité du régime.

L’Iran en réponse aux décisions du parlement européen les a, de son côté, menacé en disant qu’il pourrait « considérer leur armée comme terroriste ».

Ils ont également parlé de sortir du NPT (Treaty on the Non-Proliferation of Nuclear Weapons).

Les efforts de la famille royale

En parlant de l’alternative bourgeoise, nous sommes obligés de signaler les efforts de la famille royale iranienne; dans ce creux du mouvement, accentué par le froid glacial du pays, la famille royale s’est mise en avant et essaie de combler le vide médiatique existant.

Les médias iraniens de langue persane à l’étranger, essaient de tout leur pouvoir de gonfler cette alternative.

Le nouveau Shah est assis dans une interview type très moderne de CNN et discute avec une journaliste en persan (18 janvier 2023, la chaîne Manoto); quand la journaliste lui dit : “mais Monsieur le roi, pourquoi vous ne faites rien pour prendre le pouvoir?” il répond: “c’est parce que les gens ne m’ont pas donné leur tutorat pour que je puisse m’exprimer en tant que leur représentant; j’ai besoin que tout le monde me le demande” et ainsi Twitter devient un instrument de démocratie bourgeoise!

C’est à la suite de cette intervention que tous les défenseurs du régime royal ou du Shah en personne, se sont réclamés followers de Monsieur Pahlavi! Aussi à plusieurs reprises quand la journaliste lui dit “mais des millions de personnes vous réclament en Iran”, il hoche la tête de haut en bas en signe d’approbation, de manière très réfléchie, comme si c’était l’évidence même; tandis que personne n’a encore vu le nom du Shah, sauf peut-être dans des provinces arriérées où les gens pensent que le Shah est toujours Nasser-el-din shah Qajar! Ou plutôt Ahmad Shah Qajar! Je me souviens que ma grand-mère pensait toujours qu’il était au pouvoir!

D’ailleurs cette histoire de tutorat a donné l’occasion d’une autre humiliation pour le Roi autoproclamé. Sur les 4 millions de followers qu’il a sur les réseaux sociaux, moins de 400 milles l’ont nommé tuteur ! et tout de suite un autre hashtag a vu le jour qui dit : « je ne donne pas de tutorat ».

Sa mère aussi, Mme Farah diba n’a pas manqué de réagir à une déclaration du porte-parole de l’État iranien qui prétendait que le Shah est parti avec des coffres de bijoux appartenant à la royauté iranienne depuis des lustres et des dizaines de coffre de diamant, des pierres précieuses ainsi que des valises de devises étrangères et des bobards de ce type.

Elle s’est montrée outragée par ses propos et c’est vrai que ce qu’il racontait était tellement exagéré que ça pouvait faire douter de sa véracité. Néanmoins elle se décrit comme une femme dont le mari vient de lui dire “Lilianne,fais les valises, on rentre à Paris!”

Apparemment, le Shah est entré dans le Palais et a crié à sa femme “Farah, fait les valises on va se sauver en Égypte!” et elle a eu à peine le temps de mettre ses chaussures pour cavaler. Elle a certainement oublié que son fils a déjà répondu à cette question en disant qu’ils ont pris 67 millions de dollars, sans compter les biens immobiliers, les actions, les bons de trésor,… et l’argent qu’il avait déjà à l’étranger.

Abbas Milani, un historien qui ne peut en aucun cas être classé à gauche, a fourni un témoignage direct dans lequel il précise que deux grands avions et un avion plus petit étaient remplis des possessions de la famille royale quand elle a quitté le pays; Aussi, nous avons su par la suite que (par exemple dans l’affaire Bettencourt) Liliane Bettencourt avait acheté une île de la famille royale iranienne, qu’elle avait refilé à son photographe, gigolo de service. Ce genre de biens devrait pulluler dans la fortune de la famille royale quand ils ont quitté le pays.

Mais au-delà de l’anecdote, cette séquence pose la question de savoir les manigances que la RI est en train de monter pour faire disparaître les joyaux de la couronne; est-ce qu’ils veulent les dérober et mettre leur forfaiture sur le dos de l’ancien régime?

Ce ne serait pas étonnant de la part des gens qui considèrent le pays comme leur prise de guerre.

La République islamique ne se voit pas comme une force d’oppression, mais plutôt comme une armée victorieuse qui a le droit de prendre ce qu’il a gagné à travers ses guerres. ِ

D’ailleurs, la sourate Al-Anfal (arabe : سورة الأنفال, Le butin) qui est la 8e sourate du Coran a précisé les choses :

« Les croyants qui auront abandonné leurs familles, pour défendre, de leurs biens et de leurs personnes la cause de Dieu, partageront le butin avec ceux qui ont donné du secours et un asile au prophète….

Nourrissez-vous des biens licites enlevés aux ennemis, et craignez le Seigneur. Il est clément et miséricordieux. »

Mais attention, il ne faut pas oublier la part du clergé :

« Souvenez-vous que vous devez la cinquième part du butin à Dieu, au prophète, à ses parents, aux orphelins, aux pauvres et aux voyageurs, si vous croyez en Dieu, et à ce que nous révélâmes à notre serviteur, dans ce jour mémorable où les deux armées se rencontrèrent. La puissance du Seigneur est infinie. »

(Traduction de Claude-Étienne Savary).

Projet Goghnous (phénix) 28 janvier 23

On avait déjà mentionné de projet Phénix comme un courant constitué sous la houlette de raisin par la vie et qui formait une sorte de « Shadow Government »

Monsieur Allahyar Kangarloo, physicien, résidant aux États-Unis et ancien directeur de ce projet qui fait partie des proches de Reza Pahlavi a fait part au média des discussions afin de créer des rapprochements entre les royalistes iraniens et ayatollah Sistani qui est un des Mojtahed shiites résidant en Irak qui pendant toutes ces années a su garder ses distances par rapport à la République islamique et qui, de temps en temps, peut éventuellement les critiquer; c’est quelqu’un de très influent parmi les chiites irakiens et le rapprochement de ces deux personnages peut constituer une base sérieuse pour la création d’une sorte d’alliance du sabre et du goupillon, sous forme d’une monarchie constitutionnelle.

Les infos diverses, glanées par ci, par là

Le samedi 21 janvier 2023 Iran et Turquie

Le samedi 21 janvier 2023 lors de la rencontre bilatérale du ministre iranien des affaires étrangères M.Abdollahi avec les responsables de la Turquie dans son discours est revenu sur “nous regrettons la mort accidentelle d’une jeune femme iranienne mais la vérité est que les intervenants étrangers, les médias occidentaux et les réseaux sociaux ont attaqué de manière organisée l’Iran avec des but politiques et sécuritaires particuliers contre la République islamique d’Iran”,

L’exécution de M.Akbari, un des responsables binational (irano-britannique) de la RI a fait réagir les anglais qui se sont rapprochés des Américains pour harmoniser leur position envers l’Iran. Blinken et le ministre anglais des affaires étrangères ont décidé d’étendre les sanctions contre l’Iran.

Le vendredi 21 janvier 2023 Ardebil en Azarbayjan

Le vendredi 21 janvier à Ardebil en Azarbayjan des cocktails Molotov ont été lancés sur le bâtiment du palais de justice..

Le 29 janvier 2023 attaque de drones à Ispahan

Le 29 janvier, les médias ont indiqué qu’une usine de production d’armement a été attaquée par drones à Ispahan.

La population a entendu 3 déflagrations au centre de la ville, il semblerait qu’il s’agisse plutôt d’entrepots d’armement, ou de laboratoires pour les industries militaires au centre de la ville; il est improbable que le régime ait installé des usines de production d’armement au centre ville quand nous savons que plusieurs installations de ce type existent dans le sud et aux alentours d’Ispahan.

Ce genre d’attaque est généralement l’œuvre des organismes sécuritaires d’Israël sur les cibles en relation avec le nucléaire.

On saurait plus tard ce qui était réellement visé. La République islamique a bien entendu déclaré que cette attaque a été neutralisée à temps sans faire de dégâts.

Le 29 janvier 2023 tremblement de terre à Khoy

Le même jour, un tremblement de terre est survenu à Khoy.

Le 25 janvier 2023 des paroles de dirigeants de la RI

Le 25 janvier, Yahya rahim-safavi, commandant du Sepah et conseiller de Khamenei a déclaré lors d’un discours: “Dieu a jeté tout le tableau Mendeleïev dans le sol de l’Iran, on a non seulement du pétrole et du gaz mais du chrome, chromite, Fer, cuivre, uranium… on a tous les éléments. Dieu nous a donné le meilleur des territoires et le meilleur des nations”… Et bien sûr le meilleur des Guides!

Monsieur Ahmad Vahidi ministre de l’Intérieur a nommé le soulèvement qui a commencé maintenant depuis 4 mois “des troubles” et il a dit que c’est le résultat d’une mauvaise mode de vie que les gens ont adopté.

Il a prétendu que les gens qui ont participé dans ces événements étaient ceux chez qui, la notion de famille avait perdu son importance.

Il a donc insisté pour renforcer le mode de vie islamique dans les familles.